Évaluation de l’incidence du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier
Ce rapport fournit une évaluation de l’incidence économique potentielle du projet de règlement du gouvernement pour le plafonnement des émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier.
Résumé
En réponse aux demandes parlementaires, ce rapport fournit une évaluation de l’incidence économique potentielle du projet de règlement du gouvernement pour le plafonnement des émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur pétrolier et gazier, publié dans la Gazette du Canada le 9 novembre 2024.
Le projet de règlement établirait un système national de plafonnement et d’échange pour le secteur pétrolier et gazier en amont, qui s’appliquerait aux émissions provenant de la production de pétrole classique, de l’exploitation de sables bitumineux, de la production et du traitement du gaz naturel et de la production de gaz naturel liquéfié.
Selon le projet de règlement, le plafond serait fixé à 27 % sous les niveaux d’émissions rapportés en 2026 pour la première période de conformité de 2030 à 2032, avec une flexibilité de mise en conformité limitée à 20 % (c’est‑à‑dire les crédits compensatoires et les unités de décarbonation admissibles). Ensemble, le plafond et la flexibilité de mise en conformité forment une limite supérieure légale effective représentant les émissions maximums autorisées pour le secteur pétrolier et gazier en amont.
Notre analyse est fondée sur les données d’émissions (historiques) mises à jour et les projections les plus récentes des émissions et de la production du secteur pétrolier et gazier d’Environnement et Changement climatique Canada et de la Régie de l’énergie du Canada.
Principaux résultats
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En l’absence du règlement proposé par le gouvernement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, notre scénario de référence indique que les émissions du secteur pétrolier et gazier en amont dépasseront la limite supérieure légale, qui est de 160 mégatonnes (Mt), de 7,1 Mt annuellement, en moyenne, sur la première période de conformité de 2030 à 2032.
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Pour atteindre la limite supérieure légale, nous supposons des réductions proportionnelles dans les sous-secteurs de la production de pétrole classique, de l’exploitation de sables bitumineux et de la production et du traitement du gaz naturel. Nous estimons que la production dans ces sous-secteurs devra être réduite de 4,9 % sur la période de 2030 à 2032 par rapport aux niveaux projetés dans notre scénario de référence.
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Cela dit, dans le cadre du projet de règlement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, la production totale projetée de ces sous-secteurs en amont sera supérieure de 11,1 % en moyenne entre 2030 et 2032 par rapport aux niveaux actuels.
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Nous estimons que la réduction requise des niveaux de production du secteur pétrolier et gazier en amont baissera le produit intérieur brut (PIB) réel au Canada de 0,39 % en 2032 et le PIB nominal de 20,5 milliards de dollars. Nous estimons en outre que l’atteinte de la limite supérieure légale sur la première période de conformité entraînera la suppression de 40 300 emplois et de 54 400 équivalents temps plein au Canada en 2032 dans l’ensemble de l’économie.
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Notre estimation de la réduction des émissions requise dans le secteur pétrolier et gazier en amont pour atteindre la limite supérieure légale se situe dans la fourchette des estimations externes. Il en va de même de nos estimations de la réduction correspondante des niveaux projetés de production de pétrole et de gaz et de l’incidence sur le PIB réel dans l’ensemble de l’économie.
Le directeur parlementaire du budget (DPB) ne fournit pas de recommandations sur des politiques économiques, financières ou climatiques aux parlementaires, pas plus qu’il n’offre d’analyses comparatives en matière de politiques ou d’analyses coûts-avantages. À l’instar des analyses du DPB concernant la tarification du carbone et le Règlement sur les combustibles propres, notre évaluation de l’incidence économique potentielle du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier ne tient pas compte des avantages liés à la réduction des émissions de GES du Canada. Cela ne signifie pas que ces avantages devraient être négligés; ceux-ci devraient plutôt être examinés dans le cadre d’une analyse coûts‑avantages du projet de règlement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, ce qui dépasse la portée de notre rapport et du mandat du DPB.
Introduction
Contexte
En décembre 2023, Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) a publié son cadre réglementaire pour plafonner les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier[^1]. Le cadre confirmait le plan du gouvernement pour la mise en œuvre d’un plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier par l’entremise d’un système national de plafonnement et d’échange[^2]. Le cadre présentait également les principaux détails de conception et décrivait l’approche envisagée pour l’établissement du plafond d’émissions et des émissions maximales autorisées (c’est‑à‑dire la limite supérieure légale). Pour aider à l’élaboration d’un projet de règlement, le gouvernement a demandé des commentaires sur son cadre réglementaire.
Le plafond d’émissions pour 2030 proposé dans le cadre a été fixé à un niveau « légèrement inférieur » à ce que seraient les émissions du secteur pétrolier et gazier en amont[^3] si des réductions techniquement réalisables étaient mises en œuvre d’ici 2030 et que la production était maintenue au niveau de 2019. La limite supérieure légale pour 2030 a été calculée de la même façon, mais selon les niveaux de production (plus élevés) du scénario de carboneutralité au Canada de 2023 de la Régie de l’énergie du Canada[^4]. Par conséquent, la limite supérieure légale comprenait 25 Mt de flexibilité de mise en conformité, en plus des 106 à 112 Mt en allocations à distribuer dans le cadre du plafond d’émissions. Cette flexibilité de mise en conformité offrait aux installations concernées l’option de verser une contribution à un fonds de décarbonation ou de remettre des crédits compensatoires canadiens.
Au début de 2024, le ministère de l’Environnement et des Aires protégées du gouvernement de l’Alberta a publié des rapports produits par le Conference Board du Canada[^5] et Deloitte[^6], qui évaluaient les incidences économiques du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier présenté dans le cadre réglementaire. Selon les deux rapports, la réduction des émissions à la limite supérieure légale nécessiterait d’importantes réductions (de plus de 10 %) des niveaux de production du secteur pétrolier et gazier prévus en 2030, ce qui entraînerait une baisse comprise entre 0,6 % et 0,9 % du PIB réel au Canada en 2030.
En novembre 2024, le gouvernement a publié le projet de règlement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier[^7]. Le projet de règlement comporte certains changements fondamentaux par rapport à l’approche présentée dans le cadre réglementaire, notamment la détermination du plafond d’émissions et la limite supérieure légale. En vertu du projet de règlement, le plafond serait fixé à 27 % sous les niveaux d’émissions rapportés en 2026 pour la première période de conformité de 2030 à 2032, avec une limite de 20 % pour la flexibilité de mise en conformité[^8].
Dans son Résumé de l’étude d’impact de la réglementation (REIR) accompagnant le projet de règlement, le gouvernement estime qu’une réduction modeste de la production projetée de pétrole et de gaz, de 0,7 % sur la période de 2030 à 2032, seraient requises pour atteindre la limite supérieure légale (modélisée), ce qui réduirait le PIB réel au Canada de 0,04 %[^9].
Dans le Document d’information accompagnant le projet de règlement, ECCC indique que les rapports produits par le Conference Board du Canada et Deloitte (ainsi que S&P) « ne reflètent pas une analyse précise du projet de règlement actuel[^10] ».
Données et projections mises à jour sur les émissions de GES
Notre analyse de l’incidence économique potentielle du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier est fondée sur les données d’émissions (historiques) mises à jour et les prévisions les plus récentes d’ECCC et de la Régie de l’énergie du Canada (REC) sur les émissions et la production du secteur pétrolier et gazier.
L’analyse de l’incidence économique du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier réalisée par ECCC, le Conference Board du Canada et Deloitte est fondée sur le Rapport d’inventaire national 2023 (RIN), lequel utilise les données d’émissions de 1990 à 2021. Le dernier RIN, publié en mai 2024, utilise les données de 1990 à 2022. Il convient de souligner que le RIN 2024 apporte d’importantes révisions (essentiellement attribuables à des améliorations méthodologiques) aux émissions du secteur pétrolier et gazier en amont. Par exemple, selon le RIN 2024, en 2021, les émissions du secteur pétrolier et gazier en amont étaient de 187 Mt, ce qui représente 26 Mt (16 %) de plus que les niveaux indiqués dans le RIN 2023[^11].
En décembre 2024, ECCC a publié le Premier rapport biennal de transparence du Canada en vertu de l’Accord de Paris (RBT1), dans lequel on retrouve des prévisions d’émissions mises à jour qui correspondent au Rapport d’inventaire national 2024. Même si en vertu du projet de règlement le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier pour la première période de conformité sera fondé sur les niveaux d’émissions observés en 2026, ces projections peuvent être utilisées pour présenter des estimations à jour sur le niveau du plafond et la limite supérieure légale pour la première période de conformité.
Les scénarios pris en compte dans le Premier rapport biennal de transparence sont fondés sur des prévisions préliminaires de la REC quant aux niveaux de production du secteur pétrolier et gazier. Par conséquent, ces prévisions de production offrent une perspective plus à jour pour le secteur pétrolier et gazier.
Principales limites de l’évaluation du DPB
Le DPB ne fournit pas de recommandations sur des politiques économiques, financières ou climatiques aux parlementaires, pas plus qu’il n’offre d’analyses comparatives en matière de politiques ou d’analyses coûts-bénéfices. Le DPB produit une projection économique et financière de référence afin d’offrir aux parlementaires un point de vue indépendant sur l’économie canadienne et les finances du gouvernement. La projection sert aussi de fondement à l’estimation des coûts des propositions en vertu du mandat législatif du DPB.
L’évaluation du DPB de l’incidence économique potentielle du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier ne présente pas d’estimation des incidences de politiques ou de mesures alternatives qui entraîneraient une réduction équivalente des émissions de GES. L’analyse comparative de diverses politiques dépasse la portée du mandat du DPB. En outre, lorsqu’il appuie les parlementaires, le DPB n’entreprend pas d’analyse pour cerner des options de politiques ou déterminer les meilleures décisions à prendre en matière de politiques.
Le scénario de référence sans plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier du DPB ne doit pas être considéré comme une politique envisageable du « laisser-faire » qui voudrait que si l’incidence économique du plafond d’émissions est négative, le gouvernement devrait adopter l’approche du laisser-faire à l’égard de la réduction des émissions de GES du Canada. Les estimations de l’incidence d’une politique donnée sont souvent mesurées ou illustrées par rapport à un scénario sans la politique en question[^12].
À l’instar des analyses du DPB sur la tarification du carbone[^13] et le Règlement sur les combustibles propres, notre évaluation de l’incidence économique potentielle du plafond des émissions du secteur pétrolier et gazier ne tient pas compte des avantages de la réduction des émissions de GES du Canada. En revanche, l’analyse coûts-bénéfices d’ECCC sur le plafond des émissions du secteur pétrolier et gazier présentée dans le REIR de novembre 2024 utilise le coût social du carbone, qui « est une estimation des dommages mondiaux associés à une tonne de carbone émise[^14] ».
Selon le DPB, ce sont surtout les résidents d’autres pays qui profiteraient des éventuels avantages économiques de la réduction des émissions du Canada en fonction du coût social du carbone[^15]. Cela ne veut toutefois pas dire que ces avantages économiques devraient être écartés, mais plutôt qu’ils pourraient être pris en considération dans une analyse coûts-bénéfices du projet de règlement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, ce qui dépasse la portée de ce rapport et le mandat du DPB[^16].
Méthodologie et principales hypothèses
Émissions du secteur pétrolier et gazier en amont
En suivant l’analyse de 2024 du Conference Board du Canada [en anglais] sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, nous segmentons les émissions assujetties au plafond dans le secteur pétrolier et gazier en amont en trois sous-secteurs : production de pétrole classique, exploitation de sables bitumineux, et production et traitement du gaz naturel. Dans chaque sous-secteur, nous faisons la distinction entre les émissions de méthane et les émissions non méthaniques (c’est-à-dire le dioxyde de carbone et l’oxyde nitreux).
Dans notre scénario de référence, qui reflète la réglementation renforcée sur les émissions de méthane du gouvernement, nous supposons que les émissions de méthane dans chaque sous‑secteur diminueront, passant des niveaux actuels à 75 % au‑dessous de leurs niveaux de 2012 au cours de la première période de conformité 2030‑2032.
Pour projeter les émissions de méthane au cours de la première période de conformité, en suivant l’approche du Conference Board du Canada, nous appliquons les estimations tendancielles et les hypothèses sur l’intensité des émissions (c’est‑à‑dire les émissions de GES par unité de production) par sous-secteur aux prévisions de production préliminaires de la REC utilisées dans le premier Rapport biennal de transparence d’ECCC (scénario « avec mesures[^17] »)[^18]. Nous prenons telles quelles les émissions futures du sous-secteur du gaz naturel liquéfié (GNL) présentées dans le scénario avec mesures d’ECCC[^19]. L’annexe A présente nos hypothèses détaillées pour les trois principaux sous-secteurs en amont.
Plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier et flexibilité de mise en conformité
Afin de présenter une estimation à jour du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier pour la première période de conformité 2030-2032, conformément à la modélisation d’ECCC nous utilisons les dernières projections d’émissions en amont du scénario avec mesures supplémentaires de 2026 présenté dans le premier Rapport biennal de transparence, lesquelles sont de 176 Mt.
Conformément au projet de règlement, le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier est fixé à 27 % sous ce niveau, ce qui donne un plafond estimatif de 128 Mt pour la première période de conformité[^20]. Compte tenu de la limite de 20 % pour la flexibilité de mise en conformité, on obtient une limite supérieure légale estimative de 160 Mt.
Estimation de l’incidence économique
Notre scénario de référence indique que les émissions du secteur pétrolier et gazier dépasseront la limite supérieure légale fixée à 160 Mt (décrite plus en détail dans la section suivante). Nous supposons que les entreprises des trois principaux sous-secteurs en amont réduiront leur production (par rapport aux niveaux de référence projetés) pour atteindre la limite supérieure légale. Nous supposons en outre que la production dans chaque sous‑secteur sera réduite proportionnellement.
Pour déterminer l’incidence directe et indirecte sur le PIB réel (au niveau national), nous appliquons nos estimations du pourcentage de réduction de la production requis pour atteindre la limite supérieure légale à l’exploitation pétrolière et gazière (sauf les sables bitumineux) et à l’exploitation des sables bitumineux dans un modèle entrées-sorties[^21]. L’incidence directe et indirecte combinée du modèle entrées-sorties est ensuite insérée dans notre modèle de prévision économique afin d’incorporer la rétroaction macroéconomique[^22]. Nous supposons que le coût financier de la flexibilité de mise en conformité entraînera une redistribution sectorielle, raison pour laquelle nous ne l’incorporons pas dans notre modélisation économique.
Résultats
Scénario de référence
Compte tenu des prévisions préliminaires de la REC à l’égard de la production des sous‑secteurs en amont, des améliorations que nous prévoyons concernant l’intensité des émissions non méthaniques et de notre hypothèse selon laquelle les émissions de méthane sont réduites à 75 % sous les niveaux de 2012, nous projetons les émissions en amont qui seront assujetties au plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier et à la limite supérieure légale (tableau 1)[^23]. L’annexe A présente les hypothèses et projections détaillées pour les principaux sous-secteurs en amont.
Notre scénario de référence montre un déclin général des émissions du secteur en amont de 19,2 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carbone (Mt d’éq. CO2), ou 10 %, d’ici 2032 par rapport aux niveaux actuels. Ce déclin est entièrement attribuable à une réduction considérable des émissions de méthane (33,3 Mt), les émissions non méthaniques, essentiellement de l’exploitation de sables bitumineux ainsi que de la production et du traitement du gaz naturel, annulant plus de 40 % de la contribution des émissions de méthane.
En supposant que le renforcement de la réglementation sur le méthane réduise les émissions de 75 % par rapport au niveau de 2012 au cours de la première période de conformité, nos estimations indiquent qu’en absence du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, les émissions en amont dépasseront la limite supérieure légale établie à 160 Mt, de 7,1 Mt annuellement, en moyenne, sur la période de 2030 à 2032.
Atteinte de la limite supérieure légale
Pour atteindre la limite supérieure légale au cours de la première période de conformité, nous supposons une réduction proportionnelle de la production dans les trois principaux sous-secteurs en amont[^24]. Pour réduire les émissions du secteur en amont jusqu'à la limite supérieure légale, nous estimons que la production (autre que celle du GNL) devra être réduite de 4,9 % sur la période de 2030 à 2032 par rapport aux niveaux projetés pour la même période dans notre scénario de référence (tableau 2)[^25]. Cela dit, selon le projet de règlement sur le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier, la production projetée de ces sous-secteurs en amont sera supérieure de 11,1 %, en moyenne, par rapport aux niveaux actuels (2022).
Selon nos hypothèses, les niveaux de production requis pour atteindre la limite supérieure légale se traduisent, sur la période de 2030 à 2032, par une production de pétrole classique légèrement inférieure aux niveaux actuels (de 2,1 % en moyenne). En revanche, malgré une baisse de la production (par rapport aux niveaux de référence projetés) pour atteindre la limite supérieure légale, l’exploitation de sables bitumineux et la production et le traitement du gaz naturel devraient rester bien au-dessus des niveaux actuels au cours de la première période de conformité (de 15,0 % et 11,9 % en moyenne, respectivement), des niveaux qui sont à un sommet historique ou près de l’être.
Pour estimer l’incidence économique de l’atteinte de la limite supérieure légale, nous avons utilisé notre modèle macroéconomique en combinaison avec un modèle entrées‑sorties, afin de simuler la réduction requise à l’égard de la production (en pourcentage).
Pour atteindre la limite supérieure légale, nous estimons que la baisse des niveaux de production projetés dans le secteur pétrolier et gazier en amont réduira le PIB réel au Canada de 0,39 % en 2032 (tableau 3). La réduction du PIB réel et la réduction du niveau des prix du PIB se combinent pour réduire le PIB nominal de 20,5 milliards de dollars en 2032. Bien qu’une partie de la réduction du PIB réel reflète une perte de productivité (c’est‑à‑dire le PIB réel par heure travaillée), en 2032 la majeure partie de la réduction reflète tant une baisse de l’emploi qu’une baisse des heures moyennes de travail. Nous estimons que l’atteinte de la limite supérieure légale au cours de la première période de conformité entraînera une suppression de 40 300 emplois et de 54 400 équivalents temps plein au Canada en 2032 dans l’ensemble de l’économie.
Étant donné que les émissions du secteur pétrolier et gazier en amont ayant atteint la limite supérieure légale de 160 Mt au cours de la première période de conformité en raison de la réduction des niveaux de production, les entreprises assujetties devront acheter des unités de décarbonation et des crédits compensatoires (totalisant 32 Mt) pour atteindre le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier de 128 Mt. Cependant, notre analyse n’incorpore pas l’incidence potentielle de l’utilisation des mesures de flexibilité de mise en conformité pour atteindre le plafond d’émissions de 128 Mt.
Malgré les différences entre les données, les méthodes, les hypothèses et les structures règlementaires, pour contextualiser notre analyse, nous comparons nos résultats à ceux d’estimations externes de l’incidence du plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier (tableau 4). Notre estimation de la réduction des émissions requise dans le secteur pétrolier et gazier en amont pour atteindre la limite supérieure légale se situe dans la fourchette des estimations externes. Il en va de même de nos estimations de la réduction correspondante des niveaux de production prévus pour le secteur pétrolier et gazier et de l’incidence sur le PIB réel dans l’ensemble de l’économie.
Analyse de sensibilité – émissions de GES de référence
Étant donné l’incertitude relative aux émissions de GES de référence au cours de la première période de conformité, nous examinons d’autres scénarios possibles concernant l’intensité des émissions, la production en amont ainsi que les émissions de méthane qui entraîneraient d’autres formes d’émissions du secteur pétrolier et gazier en amont en l’absence du règlement envisagé (tableau 5).
Toutes choses étant égales par ailleurs, en supposant que l’intensité des émissions non méthaniques liées à la production et au traitement du gaz naturel atteigne des niveaux conformes à la tendance à la baisse plus marquée entre 2014 et 2022 (au lieu de 2005 à 2022), les émissions seraient inférieures de 8 Mt par an en moyenne par rapport à notre scénario de référence, légèrement en dessous de la limite supérieure légale.
Toutes choses étant égales par ailleurs, en supposant que l’intensité des émissions non méthaniques de la production de pétrole classique augmente pour atteindre des niveaux conformes à la tendance à la hausse entre 2005 et 2022 (au lieu d’être maintenue au niveau de 2022), les émissions seraient supérieures de 4 Mt par an, en moyenne, par rapport à notre scénario de référence.
Toutes choses étant égales par ailleurs, en supposant des niveaux de production de pétrole et de gaz naturel en amont plus faibles, conformément au scénario de prix bas du RBT1 d’ECCC[^26] (au lieu du scénario avec mesures) les émissions projetées seraient nettement inférieures (18 Mt par an en moyenne) à celles de notre scénario de référence, bien en dessous de la limite supérieure légale.
Toutes choses étant égales par ailleurs, en supposant que les émissions de méthane chutent à 65 % en dessous des niveaux de 2012 au cours de la période de conformité (au lieu de 75 % en vertu de la réglementation renforcée sur le méthane), les émissions seraient supérieures de 8 Mt par an, en moyenne, par rapport à notre scénario de référence.
Pour préciser le contexte, nous présentons la prévision des émissions en amont du scénario avec mesures d’ECCC dans le RBT1. Ce scénario n’intègre pas le plafond d’émissions du secteur pétrolier et gazier ni le renforcement de la réglementation sur les émissions de méthane et projette des émissions supérieures de 5 Mt par an, en moyenne, par rapport à notre scénario de référence sur la période de 2030 à 2032.
Annexe A : Hypothèses détaillées pour les sous-secteurs
Production de pétrole classique
Les prévisions préliminaires de la Régie de l’énergie du Canada indiquent que la production de pétrole classique au cours de la première période de conformité 2030-2032 sera en moyenne supérieure de 2,9 % aux niveaux actuels (tableau A1).
Pour la production de pétrole classique, nous supposons que l’intensité des émissions non méthaniques (mesurée en kilotonnes d’équivalent dioxyde de carbone par million de barils produits par jour) restera à son niveau actuel au cours de la première période de conformité[^27]. Cette hypothèse se situe en dessous du point médian de la fourchette entre ce que la tendance historique (à la hausse)[^28] de l’intensité des émissions non méthaniques entre 2005 et 2022 indiquait et le scénario avec mesures d’ECCC.
Sur la base des prévisions préliminaires de la REC concernant la production de pétrole classique et de l’intensité des émissions non méthaniques que nous avons supposée, nous prévoyons que les émissions non méthaniques au cours de la première période de conformité seront légèrement supérieures aux niveaux actuels. En supposant que les émissions de méthane entre 2030 et 2032 chutent de 75 % par rapport aux niveaux de 2012 (en raison du renforcement de la réglementation sur le méthane), les émissions totales pour la production de pétrole classique devraient atteindre en moyenne 24,5 Mt par an au cours de la première période de conformité, soit 15,3 Mt (38 %) sous les niveaux actuels.
Exploitation de sables bitumineux
Les prévisions préliminaires de la Régie de l’énergie du Canada indiquent une augmentation significative de l’exploitation de sables bitumineux de 20,9 % (à l’exclusion des installations de traitement[^29], en moyenne, au cours de la première période de conformité 2030-2032 par rapport aux niveaux actuels (tableau A2).
Pour l’exploitation de sables bitumineux (à l’exclusion des installations de traitement), nous supposons que l’intensité des émissions non méthaniques continuera de diminuer, pour atteindre des niveaux conformes à la tendance historique à la baisse[^30] sur la période de 2005 à 2022[^31]. Il en résulte une intensité des émissions non méthaniques supposée au cours de la première période de conformité qui est de 10 % inférieure aux niveaux actuels, en moyenne, mais de 9 % supérieure aux projections du scénario avec mesures d’ECCC[^32].
D’après les prévisions préliminaires de la REC concernant l’exploitation des sables bitumineux et l’intensité des émissions non méthaniques que nous avons supposée, nous prévoyons que les émissions non méthaniques au cours de la première période de conformité seront plus élevées par rapport aux niveaux actuels. En supposant que les émissions de méthane entre 2030 et 2032 chutent de 75 % par rapport au niveau de 2012 (en raison du renforcement de la réglementation sur le méthane), les émissions totales du sous-secteur des sables bitumineux devraient atteindre en moyenne 91,5 Mt par an au cours de la première période de conformité, soit 5,4 Mt (6 %) au-dessus des niveaux actuels.
Production et traitement du gaz naturel
Les prévisions préliminaires de la Régie de l’énergie du Canada indiquent une augmentation significative de la production et du traitement du gaz naturel de 17,7 % en moyenne au cours de la première période de conformité 2030-2032 par rapport aux niveaux actuels (tableau A3).
Pour la production et le traitement du gaz naturel, nous supposons que l’intensité des émissions non méthaniques au cours de la première période de conformité atteindra des niveaux conformes à la tendance historique à la baisse[^33] sur la période de 2005 à 2022[^34]. Il en résulte une intensité supposée des émissions non méthaniques entre 2030 et 2032 qui est inférieure de 4 % aux niveaux actuels, en moyenne, mais supérieure de 29 % aux projections du scénario avec mesures d’ECCC[^35].
Sur la base des prévisions préliminaires de la REC concernant la production et le traitement du gaz naturel, et de notre hypothèse d’intensité des émissions non méthaniques, nous prévoyons que les émissions non méthaniques au cours de la première période de conformité seront plus élevées par rapport aux niveaux actuels. En supposant que les émissions de méthane sur la période de 2030 à 2032 chutent de 75 % par rapport aux niveaux de 2012 (en raison du renforcement de la réglementation sur le méthane), les émissions totales du sous-secteur de la production et du traitement du gaz naturel devraient atteindre en moyenne 48,4 Mt par an au cours de la première période de conformité, soit 11,6 Mt (19 %) sous les niveaux actuels.
Communications
Citations
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Selon nos calculs, pour respecter la limite supérieure légale, la production du secteur pétrolier et gazier en amont devra baisser de 4,9 % sur la période de 2030 à 2032 par rapport aux niveaux projetés dans notre scénario de référence.
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Notre estimation de la réduction des émissions requise dans le secteur pétrolier et gazier pour atteindre la limite supérieure légale se situe dans la fourchette d’estimations externes. Il en va de même pour nos estimations de la réduction des niveaux projetés de production de pétrole et de gaz et de l’incidence sur le PIB réel dans l’ensemble de l’économie.
Directeur parlementaire du budget