Analyse du seuil de rentabilité des subventions à la production accordées à Stellantis-LGES et Volkswagen
Ce rapport présente une analyse de rentabilité du soutien accordé à Stellantis-LG Energy Solutions et à Volkswagen afin d’estimer la période au cours de laquelle les recettes publiques générées par leurs usines de fabrication de batteries pour véhicules électriques (VE) seront égales au montant total des subventions à la production annoncées par les gouvernements du Canada et de l’Ontario.
Résumé
Au mois d’avril, le gouvernement fédéral a annoncé un soutien financier à Volkswagen pour son usine de fabrication de batteries pour véhicules électriques (VE), dont un montant estimé à 13,2 milliards de dollars en subventions à la production. Au moment de l’annonce, le premier ministre a indiqué que « [s]elon les projections, le projet générera, en moins de cinq ans, des retombées économiques équivalentes à la valeur de l’investissement du gouvernement ».
Au mois de juillet, le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’Ontario ont annoncé des subventions à la production pour l’usine de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LG Energy Solutions (LGES), sous réserve d’un plafond global de 15 milliards de dollars. Selon les estimations du gouvernement fédéral, cette mesure porte les subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES et Volkswagen à 28,2 milliards de dollars d’ici la fin de 2032.
Parallèlement, le gouvernement fédéral a annoncé un accord de partage des coûts avec le gouvernement de l’Ontario. Aux termes de cet accord, le gouvernement fédéral couvrira désormais les deux tiers des subventions à la production pour Stellantis-LGES et Volkswagen (18,8 milliards de dollars), tandis que l’Ontario en fournira le tiers (9,4 milliards de dollars).
Le gouvernement fédéral n’a pas annoncé de période d’atteinte du seuil de rentabilité pour les subventions à la production de Stellantis-LGES.
Le présent rapport décrit tout d’abord l’analyse du seuil de rentabilité effectuée par le gouvernement fédéral pour la subvention à la production accordée à Volkswagen. Ensuite, en utilisant la même source de données, nous présentons une analyse du seuil de rentabilité du soutien accordé à Stellantis-LGES et à Volkswagen.
Compte tenu de l’incertitude quant à l’emplacement géographique futur des investissements et de la production liés à d’autres nœuds de la chaîne d’approvisionnement des VE, tels que le montage des VE et la production de matériaux pour les batteries, l’estimation du DPB ne représente que les recettes publiques générées par la fabrication de cellules et de modules, qui est à la base des subventions à la production. Cela contraste avec l’analyse du seuil de rentabilité du gouvernement fédéral pour Volkswagen, qui incluait des investissements et des augmentations supposées de production dans d’autres nœuds de la chaîne d’approvisionnement des VE.
Le DPB estime que les recettes des gouvernements fédéral et provinciaux générées par les usines de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LGES et de Volkswagen sur la période de 2024 à 2043 seront égales au montant total des subventions à la production. Autrement dit, la période d’atteinte du seuil de rentabilité des 28,2 milliards de dollars de subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES et Volkswagen est estimée à vingt ans.
Contexte
Au mois de juin, le DPB a publié un rapport qui examinait le soutien du Canada à l’usine de fabrication de batteries pour véhicules électriques (VE) de Volkswagen[^1]. Le financement fédéral comprenait une subvention à la production correspondant au crédit d’impôt pour la production manufacturière avancée de la loi américaine Inflation Reduction Act. Il comprenait également une contribution par l’intermédiaire du Fonds stratégique pour l’innovation destinée à soutenir la construction de l’usine.
Depuis la publication du rapport de juin du DPB, de nouvelles annonces ont été faites au sujet du secteur de l’automobile. Le 6 juillet, le gouvernement fédéral a annoncé un soutien financier à l’usine de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LG Electric Solutions (LGES) [^2][^3]. L’usine de Stellantis-LGES, annoncée le 23 mars 2022, est la première usine de fabrication de batteries pour VE à grande échelle à être construite au Canada[^4].
La subvention à la production qui sera accordée à Stellantis-LGES pour les cellules de batterie est identique à celle offerte à Volkswagen, soit 35 dollars américains par kilowattheure (kWh). Stellantis-LGES recevra également une subvention à la production pour les modules de batterie, équivalant à 10 dollars américains par kWh. Ces subventions à la production égalent le montant du crédit d’impôt pour la production manufacturière avancée de la loi américaine Inflation Reduction Act et sont soumises à un plafond global de 15 milliards de dollars.
Selon les estimations du gouvernement fédéral, cette mesure porte les subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES (jusqu’à concurrence de 15 milliards de dollars) et Volkswagen (de 13,2 milliards de dollars) à 28,2 milliards de dollars d’ici la fin de 2032. Après 2032, les subventions à la production seront éliminées[^5].
En plus de la nouvelle entente avec Stellantis-LGES, le gouvernement fédéral a annoncé un accord de partage des coûts avec le gouvernement de l’Ontario. Aux termes de cet accord, le gouvernement fédéral couvrira désormais les deux tiers des subventions à la production pour Stellantis-LGES et Volkswagen (18,8 milliards de dollars), tandis que l’Ontario fournira le tiers du financement (9,4 milliards de dollars). Aucune modification n’a été apportée à l’accord existant entre le gouvernement fédéral et Volkswagen.
En outre, à la suite de la publication du rapport de juin du DPB, la ministre des Finances a précisé que les subventions à la production accordées à Volkswagen ne seraient pas assujetties à l’impôt[^6].
Le présent rapport décrit tout d’abord l’analyse du seuil de rentabilité effectuée par le gouvernement fédéral pour la subvention à la production accordée à Volkswagen. Ensuite, en utilisant la même source de données sous-jacente, nous présentons une analyse de rentabilité du soutien accordé à Stellantis-LGES et à Volkswagen afin d’estimer la période au cours de laquelle les recettes publiques générées par leurs usines de fabrication de batteries pour VE seront égales au montant total des subventions à la production annoncées par les gouvernements du Canada et de l’Ontario.
Analyse du seuil de rentabilité
L’analyse par le gouvernement fédéral du seuil de rentabilité de la subvention à la production accordée à Volkswagen
Lorsque le gouvernement fédéral a annoncé l’entente avec Volkswagen, au mois d’avril, le premier ministre a indiqué que « [s]elon les projections, le projet générera, en moins de cinq ans, des retombées économiques équivalentes à la valeur de l’investissement du gouvernement »[^7]. Cette période a été reprise par le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, qui a déclaré que l’investissement serait rentable en l’espace de cinq ans[^8].
Au moment de l’annonce, aucun détail sous-jacent n’a été fourni sur la période d’atteinte du seuil de rentabilité. Pour comprendre l’analyse étayant la période établie par le gouvernement, le DPB a envoyé une demande d’information au ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie.
En réponse à la demande du DPB, le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique (ISDE) a indiqué que pour estimer la période d’atteinte du seuil de rentabilité, il s’était appuyé sur la modélisation effectuée par le Trillium Network for Advanced Manufacturing (Trillium Network) et Clean Energy Canada dans leur rapport de 2022, intitulé Canada’s New Economic Engine. Ce rapport présente quatre scénarios potentiels pour la chaîne d’approvisionnement en batteries pour véhicules électriques au Canada en 2030, en fonction de divers degrés de soutien gouvernemental (non quantifiés), et il estime les répercussions économiques selon chaque scénario.
ISDE a mis de l’avant deux scénarios intéressants pour son analyse : les scénarios 1 et 3. Le premier scénario (adoption hors cible de VE) inclut uniquement les investissements liés aux batteries pour VE annoncés au Canada au moment de la rédaction du rapport, y compris l’installation de Stellantis-LGES. De plus, il part du principe que les ventes de VE au Canada et aux États-Unis n’atteindront pas les cibles annoncées par le gouvernement. ISDE a qualifié le scénario 1 de scénario le plus probable si le gouvernement fédéral n’avait pas annoncé la subvention à la production pour Volkswagen.
Le scénario 3 (maintien de l’élan) comprend l’ajout d’une autre grande installation de cellules de batterie, ainsi que la réalisation des cibles de ventes de VE annoncées par le gouvernement au Canada et aux États-Unis. Il comprend également des investissements supplémentaires et des augmentations présumées de la production dans d’autres nœuds de la chaîne d’approvisionnement des VE.
ISDE a ensuite utilisé la différence entre les scénarios 3 et 1 pour représenter l’effet d’accroissement de l’investissement dans l’usine de fabrication de batteries pour VE de Volkswagen et d’autres investissements dans la chaîne d’approvisionnement des VE[^9]. Pour estimer la période d’atteinte du seuil de rentabilité de la subvention à la production annoncée pour Volkswagen, ISDE a calculé la différence des recettes combinées des gouvernements fédéral et provinciaux en 2030 entre le scénario 3 (6,7 milliards de dollars) et le scénario 1 (2,7 milliards de dollars), comme le montre le tableau 1.
En supposant que les recettes publiques augmentent de 4 milliards de dollars par année au niveau de production complet, ISDE a estimé que les recettes publiques (c’est-à-dire fédérales et provinciales), sur une base cumulative, seraient égales à la valeur de la subvention à la production (de 13,2 milliards de dollars) dans 3,3 ans – ce qui respecte l’échéance de « moins de cinq ans » annoncée par le premier ministre et le ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie[^10].
La modélisation réalisée par le Trillium Network englobe l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement des VE. Comme le montre le tableau 1 ci-dessus, les recettes publiques mentionnées dans le rapport comprennent les recettes générées par tous les nœuds de la chaîne d’approvisionnement[^11]. La fabrication des cellules, qui aura lieu à l’usine de Volkswagen, ne représente qu’une fraction des recettes supplémentaires (8,6 %) à l’échelle de la chaîne d’approvisionnement. ISDE a confirmé au DPB que le résultat des recettes publiques supplémentaires dont il est question dans son analyse « n’est pas attribuable au seul investissement de PowerCo. [Volkswagen], mais aussi aux investissements qui devraient se faire tout au long de la chaîne d’approvisionnement »[^12].
Le gouvernement fédéral n’a pas annoncé de période d’atteinte du seuil de rentabilité pour les subventions à la production de Stellantis-LGES.
Analyse par le DPB du seuil de rentabilité des subventions à la production accordées à Stellantis-LGES et à Volkswagen
En nous fondant sur le même rapport du Trillium Network utilisé par ISDE, nous estimons une période d’atteinte du seuil de rentabilité pour les 28,2 milliards de dollars de subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES et Volkswagen[^13].
Toutefois, compte tenu de l’incertitude quant à l’emplacement géographique futur des investissements et de la production liés à d’autres nœuds de la chaîne d’approvisionnement des VE, tels que le montage des VE et la production de matériaux pour les batteries, notre estimation ne représente que les recettes publiques générées par la fabrication de cellules et de modules, qui est à la base des subventions à la production[^14]. Cela contraste avec l’analyse du seuil de rentabilité du gouvernement fédéral pour Volkswagen, qui incluait des investissements et des augmentations de production supposées dans d’autres nœuds de la chaîne d’approvisionnement des VE.
Aux fins du présent rapport, le seuil de rentabilité correspond à la période au cours de laquelle les recettes publiques générées par les usines de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LGES et de Volkswagen, sur une base cumulative, sont égales au montant des subventions à la production annoncées par les gouvernements du Canada et de l’Ontario (28,2 milliards de dollars). En outre, la période d’atteinte du seuil de rentabilité que nous avons établie commence à la première année de production prévue (2024 pour Stellantis-LGES).
L’analyse par le DPB du seuil de rentabilité n’est pas une analyse coûts-avantages. Elle n’inclut pas les frais de la dette publique qui seraient engagés pour financer les subventions à la production, et elle n’actualise pas non plus les montants des recettes et des dépenses publiques futures (c’est-à-dire un calcul de la valeur actualisée)[^15].
En incluant les usines de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LGES et de Volkswagen, nous estimons que le scénario 3 du rapport du Trillium Network est le plus pertinent. En utilisant les recettes publiques et les niveaux de production pour la fabrication de cellules et de modules du scénario 3, nous avons calculé les recettes exprimées en dollars par gigawattheure (GWh) pour les deux nœuds (tableau 2).
Les rendements des recettes publiques ont ensuite été appliqués aux niveaux de production annuels projetés des deux usines de manière à estimer les recettes publiques sur une base annuelle, à partir de la première année de production prévue en 2024.
Étant donné que les recettes publiques figurant dans le rapport du Trillium Network sont projetées en 2030, nous avons augmenté les rendements des recettes en fonction de la croissance projetée du produit intérieur brut nominal pour les exercices au-delà de 2030, d’après le rapport sur la viabilité financière de juillet 2023 du DPB. Pour les années 2024 à 2029, nous sommes partis du principe que les rendements de recettes de 2030 seraient réalisés[^16].
La production de cellules et de modules de batterie de 2024 à 2032 est fondée sur les estimations fournies dans les ententes avec Stellantis-LGES et Volkswagen. Au-delà de 2032, nous sommes partis du principe que les niveaux intégraux de production de cellules et de modules seraient maintenus[^17].
Nous estimons que les recettes des gouvernements fédéral et provinciaux générées par les usines de fabrication de batteries pour VE de Stellantis-LGES et de Volkswagen sur la période de 2024 à 2043 seront égales au montant total des subventions à la production (tableau 3). Autrement dit, la période d’atteinte du seuil de rentabilité des 28,2 milliards de dollars de subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES et Volkswagen est estimée à vingt ans.
Communications
Citation
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Nous estimons que les recettes fiscales fédérales et provinciales générées par les usines de fabrication de batteries pour véhicules électriques de Stellantis-LGES et Volkswagen sur la période de 2024 à 2043 seront égales au montant total des subventions à la production. C’est à dire que le délai pour récupérer les 28,2 milliards de dollars en subventions à la production annoncées pour Stellantis-LGES et Volkswagen est évalué à vingt ans, ce qui est beaucoup plus long que le moins de cinq ans mentionnés par le gouvernement pour Volkswagen.
Directeur parlementaire du budget